ENTRETIEN AVEC UN ARTISTE
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Laurent Rousseau, membre de la ligue des utopistes non alignés.
Pour la quinzième édition du festival des Arts de la Rue et du Cirque de Cergy-Pontoise, « Cergy, soit ! », la Ligue des utopistes non alignés nous offre un Dispositif Inespéré de Conférence Motorisé Pliable, spectacle que nous aimerions à rallonge, servi par deux poètes en constructions concentrées de technologies vertes avec, pour rester aux abois tout du long, Monsieur K et Monsieur E, K.€ pour les plus consuméristes, E.K. pour ceux qui n’ont pas mis de haine dans leur casse-croûte, en anglais K.E. comme passeport prolongé pour l’ailleurs ou E.K pour les jeunes branchés informatique ou les vieux amateurs d’extra care être.
Ces deux troubadours, revenus vers un futur où ils ont dû troquer la blouse blanche contre le bleu de travail pour mettre leurs quatre mains dans la tambouille, nous propose à l’aide de leurs Machines Improbables à Rentabilité Limitée, une démonstration scientifico-sentimentale sur la possibilité du bonheur et nous offre, pour y parvenir sans apport chimique artificiel mais à base d’inventions naturelles issues d’un recyclage aléatoire, un bon moment en chansons ponctuées de belles phrases d’auteurs pour rester assis en tailleur sans avoir mal aux aiguilles.
Romain : La rencontre et le passage à l’acte ?
Monsieur E (Laurent Rousseau) : Comme tous les projets artistiques, nous nous sommes croisés sur d’autres projets d’autres personnes, et puis nous nous sommes dit « Tiens, il y a quand même une espèce de lien de parenté. »
Une alchimie qui s’est créée entre vous deux ?
Oui, et puis surtout tu as l’impression que tu habites tout seul sur la Lune quand tu fais ce genre de trucs, jusqu’au jour où tu en rencontres un autre et puis tu te dis « Ben tiens, on n’est peut-être pas tout seul. »
On pourrait être deux et…
On fait une famille, voilà. Nous avons fait un premier spectacle qui s’appelait La Féroce Mécanique Des Jours, qui était un gros spectacle avec des machines de cinq, six mètres de haut. Nous étions cinq : il y avait un pépé qui jouait de l’accordéon dans une très grosse structure en métal, remplie de machines dans tous les sens, des boules de pétanques qui rebondissaient sur des trucs, des bazars pas possibles, des gants de boxe qui tombaient de façon aléatoire sur des tambours d’eaux, donc ça faisait une espèce de musique céleste. Puis il y avait une danseuse, ça ne se déroulait pas sur scène en extérieur mais dans un théâtre, et elle dansait dans une espèce d’appartement avec une table, une chaise, un canapé et un frigo sur lequel il y avait des vidéos de projeter ; le frigo, c’était son miroir. Et le canapé se levait, elle faisait une espèce de danse du sommeil, et le canapé se levait, ce qui faisait que le public se trouvait d’un seul coup au plafond. Il y avait plein d’idées sur lequel tu changes le regard des choses. C’était un spectacle sur le regard.
C’est à cette occasion que vous avez amenée cette idée de recycler ?
Oh non, c’est plus vieux que ça. Monsieur K (Alain Kashtoun Cadeillan) ça fait quarante ans qu’il fait ça ; moi ça fait vingt ans, mais parce qu’il est plus vieux.
Les humoristes qui ont pu vous inspirer pour la conduite du spectacle ? J’ai cru sentir du Albert Dupontel.
Souvent on me dit ça, mais à mon avis c’est plutôt physique qu’autre chose parce que, dans…
Dans les intonations…
Ou alors même les mimiques, c’est-à-dire, ma tronche, quand je fais des drôles de tronches, hé bien tout de suite on me dit : « tu ressembles à Albert Dupontel » ; c’est un truc qui est quasiment extérieur à moi. C’est vraiment un truc, moi quand je fais l’andouille, ma tronche lui ressemble, alors les gens me disent « Oh on dirait Albert Dupontel ». Et puis il y a l’espèce d’humour très noir sous un dehors de personnage un peu naïf, et j’aime bien ça.
La maîtrise du public que j’ai adoré…
Ça c’est le métier ; si tu veux, on a beaucoup joué, et les gamins, c’est une parenthèse que j’ouvre comme ça : en ce moment, on a un problème de concentration sur les plus petits ; enfin en ce moment, ça fait dix ans que ça s’empire… parce qu’en fait, c’est lié aussi à plein de choses mais, pédagogiquement, les gens font de la consommation de spectacles souvent. C’est-à-dire que c’est tout et n’importe quoi, les jauges sont énormes, mais bon ça c’est la vie, tu as les gens qui viennent, qui repartent… et il faut arriver à gérer les enfants, parce que les parents abandonnent ça. Ils pensent qu’ils sont au spectacle et donc que c’est à nous de gérer ça. Là on a la chance d’avoir un type qui gère à côté les gens, mais sinon on retrouve des mecs dans notre bagnole, c’est la folie.
Et donc il y a un espèce de sans gêne comme ça. Nous on s’en fout, on n’est pas là en moralisateurs, mais c’est vrai que pour conduire un spectacle, quand tu es sur scène, tu n’as pas que ça à faire, et du coup toute l’énergie que tu passes à couper ton spectacle pour gérer les gamins, c’est quelque chose qui te fait perdre un peu le fil pour les gens, qui entravent le bon déroulement. Ce qui fait que maintenant, quand je dis au début au spectacle : « Bon les enfants, vous restez avec les parents et vous ne parlez pas parce que je ne suis pas une télévision », le public applaudit. Ça vient du public, le public en a marre.
Il y a un vrai boulot à faire je pense sur les gamins, enfin les gamins et les parents aussi, et leur dire : il faut qu’ils aillent au spectacle et qu’ils se rendent compte qu’ils viennent voir quelque chose. Seulement on n’est pas avec la zappette, et ce n’est pas une télé. Et ce n’est pas facile.
Un retour sur la discipline à suivre et sur celle à poursuivre, ou plutôt une rééducation du public ?
Une pédagogie du public. C’est-à-dire que je ne leur en veux pas parce qu’en fait tant qu’on ne sait pas, tu vois, on est dans de la consommation de tout, donc du coup c’est logique qu’ils en viennent à la consommation du spectacle. Il y en a qui viennent et : « Oh ouai c’est pas mal, on reste, on s’en va… » Alors que ce n’est pas ça le truc, c’est : Je viens voir une forme, je l’ai choisi sur le programme, je viens et j’écoute ; et à la fin, je dis « ça m’a plu, ça ne m’a pas plu », mais je donne une chance à l’Objet, je suis là.
Est-ce dans ce sens que vous intervenez dans les écoles, une façon pour vous de réapprendre à muscler l’attention et à gérer l’effet de groupe ?
Moi je suis un pédagogue. Parallèlement à mon métier d’artiste musicien, j’ai dirigé une école de jazz pendant quinze ans avant, plus maintenant parce que je n’ai plus le temps. Mais la pédagogie, c’est quelque chose qui m’intéresse beaucoup. J’ai des enfants aussi, donc c’est un truc qui me passionne la pédagogie. Du coup nous avons monté ce truc là, nous faisons un truc sur tous les gamins, tu pourras lire ça.
Nous prenons cent gamins, et nous leur faisons faire des ateliers sur le respect. C’est-à-dire que nous faisons une chorale qui ne chante pas ! Les gamins se disent : « Bon ceux-là, ils sont complètement barjo, ce sont des adultes mais ils sont pires que nous », déjà ça ouvre une porte, nous leur disons : « Vous êtes des enfants mais en fait nous, nous sommes plus barjo que vous », ils se disent : « Mais c’est vrai, ils sont graves », et du coup ça nous fait une clef pour arriver à les accrocher. Nous nous mettons les profs dans la poche aussi parce que c’est important d’avoir les profs. Si nous avons des profs qui corrigent leurs copies pendant que nous faisons notre truc, ça ne marche pas. La clef c’est les profs.
Rapport au jazz, vous donnez un regard musical sur le recyclage et comment égayer son quotidien en en bricolant l’inutile ou ce que l’on mettrait au rebus, un côté écolo développé pour lutter contre une production à outrance ou contre l’ennui qui risque d’envahir nos maisons par la télévision ?
Exactement, c’est un truc sur la consommation, mais aussi développer l’inutile, c’est-à-dire que l’utopie c’est ça, ça rejoint l’idée d’utopie.
Aujourd’hui, tu achètes une montre, elle ne marche plus, tu ne l’as fait pas réparer, tu achètes une autre montre, c’est dramatique. Alors pendant ce temps là, on fait bosser des enfants à un euro par mois, mais la montre, toi tu la changes, tu ne la répares pas, et ça me semble complètement dramatique. C’est un monde qui marche sur la tête. Il faut absolument que ça soit ça parce qu’il faut acheter parce qu’il faut conserver les emplois ; mais ça n’a aucune réalité, la vraie réalité ce serait d’avoir des réparateurs de montres. C’est de la folie, c’est un truc de dingue.
L’utopie pour nous, c’est quand même un truc hyper important, parce qu’on pense que tout part une utopie. Le premier type qui a marché sur la Lune…
Il en a rêvé avant.
Il a dit : « Je vais marcher sur la Lune », et tout le monde l’a prit pour un naze. Et un jour, il a marché sur la Lune et ensuite tout le monde dit « Ben c’est normal ».
Tout part d’un rêve, c’est Hugo, ‘‘ Promontoire du rêve. ’’ Il dit : « Tout part d’un rêve ». Au début, il n’y a pas le Verbe, au début il y a un rêve. Et ce rêve, un jour il devient vrai, parce que le mec y croit. Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait. C’est ça qu’on dit, non ?
Différentes références artistiques, de grands auteurs, de Nietzsche au Beatles ; pour marier un peu les deux, vous amenez encore tous vos spectacles à être construits ainsi ?
C’est important que ça ne soit pas que drôle.
Glisser des phrases d’auteurs pour qu’elles résonnent dans la tête des gens ?
Il faut planter des graines. On ne peut pas parler de pédagogie et ne pas planter de graines. Il faut commencer par planter et puis ça va pousser. Les gens vont se dire : « Hé, on a bien rigolé et puis il avait dit une phrase ». Des fois c’est un tout petit truc.
Quand on dit : « Tout ce qui se fait par Amour, s’accomplit toujours par delà Bien et Mal » de Nietzsche, c’est quand même très fort, c’est-à-dire que la morale on s’en tape.
Surtout que là tu interviens sur un enfant et ça pousse encore plus l’adulte à réfléchir là-dessus, et puis ça interpelle les autres enfants.
Venant de Nietzsche, on se dit que ce n’est pas pour nous, alors que Nietzsche c’est l’un des philosophes les plus artistiques…
Les plus poétiques…
Et le plus poétique. Le plus complètement ailleurs, c’est un artiste complet.
Vous marriez aussi Sciences et Poésie avec le même souci du bricolage inventif et instructif. J’ai bien aimé le côté le corps est composé de quatre-vingt pour cent d’eau qui s’évaporent et après vous parlez de la mort.
Ça c’est le dispositif Poésie, c’est le regard que nous portons sur les choses.
Même démarche, en tout cas, c’est vraiment magnifique. Ça permet de faire une passerelle importante.
Les sujets importants dans la vie il n’y en a pas beaucoup, il y a la mort, il y a l’amour, il y a des trucs comme l’absence mais c’est lié ; il y a quatre, cinq sujets, tout le monde développe ça et puis après on tourne en rond.
Après, sur la Science, concernant les instruments, c’est plus l’empirisme. Parce que les lutheries imaginaires, par exemple quand Monsieur K fait une clarinette basse, au début il fait les trous et puis après il voit, et puis il se dit « Ha non » et puis petit à petit…
Alors le mec qui voit la fin, il se dit qu’il y a des formules mais il n’y a pas de formule, faut les trouver soi-même les formules, la vie ce ne sont pas les formules.
Votre site web, liguedesutopistes.fr, reflète bien l’esprit du spectacle et la marche que prend votre aventure ; au-delà la mise en place d’une mini série décalée à dimension spatiale pour tenter de faire se rejoindre l’internaute et une réflexion poétique à différents degrés humoristiques, comment comptez-vous l’animez ?
Le site fonctionne depuis deux ans, il y a tout un tas de rubriques qui ne sont pas encore remplies, ça fait quand même deux ans qu’il existe, et je n’ai pas encore tout fait parce que nous avons beaucoup tourné, mais il va y avoir la présentation des utopistes qui vont être complètement à la masse, les biographies de chaque utopiste qui vont être complètement graves et l’historique de la Ligue. Et puis les pensées fulgurantes de Monsieur Z, donc là c’est pareil, il faut que ça soit poursuivi.
J’aime bien les ‘‘ Ils les ont vus ’’, ça il faut que tu ailles voir. ‘‘ Ils les ont vus ’’ , ce sont des témoins, des gens qui parlent de nous, il y a des nains de jardin, il y a une ancienne Claudette, il y a des trucs de dingue…
Un livre qui a marqué votre vie ?
La littérature, je m’y suis mis tard. Ce n’est pas au lycée que je me suis mis à lire, mais par contre depuis, je lis comme un fou, c’est compulsif. Alors il y a des auteurs que j’adore, et puis je suis en train d’écrire un roman. Ce sera fini dans six mois à peu près. Ça s’appellera La Féroce Mécaniques Des Jours. Et c’est un texte qui parle de la mort ; d’ailleurs l’idée de l’eau est dedans, c’est un prolongement du spectacle. Le livre va faire dans les quatre cents pages.
Mais un livre qui t’a vraiment bouleversé, qui t’a vraiment plu ?
C’est dur de dire un, et ce n’est pas tout à fait collé à ce spectacle là ; c’est un spectacle de rue, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.
Mais alors, collé à toi ?
J’adore Romain Gary, parce que, Romain Gary, il se trouve qu’il est sous-estimé dans la littérature française. C’est un mec qui avait une super plume, mais aussi un esprit frondeur, il y a une drôlerie de fou là-dedans. Il n’y a pas de mauvais Gary, il y en a qui vont te dire « Oui ça c’est un bon Gary… » mais c’est tout incroyable. L’acuité qu’il a d’autodérision, le regard qu’il a sur l’humanité qui est tendre, il a une tendresse folle pour les hommes, mais il déteste les hommes, il les aime, il les déteste, il a un rapport… Il est hyper satirique, ironique. J’adore Gary, c’est vraiment un mec qui a un point de vue singulier sur l’humanité et sa comédie perpétuelle; et tu lis un Gary, en deux pages tu sais que c’est lui.
Dans les Gary, il y en a plein de magnifiques. Mais il y a ‘‘ Gros Câlin ’’, qu’il a écrit sous un pseudo ; c’est le seul mec à avoir eu deux fois le Goncourt, c’est un escroc de première. Et puis il y a le mysticisme, c’est un espèce de mystique qui a les pieds dans la terre.
Il y a : ‘‘ La nuit sera calme ’’. C’est magnifique. Les mecs, ils sont à la guerre. Ils sont une bande d’aviateurs, résistants résistant, ils ont sauvé la France. Et avant ça, ils vont bombarder, ils font des rondes. Et il y en a un, tous les soirs avant de partir en avion face aux Allemands, il dit : « La nuit sera calme ». Jusqu’au jour où il n’est pas revenu. Ça c’est magnifique. Le mec conjure le sort… la nuit sera calme… Mais il sait très bien qu’il y a un jour où il ne va pas revenir. C’est juste histoire de dire : « pour l’instant on est là, il n’y a pas de soucis, restons calme les gars. »
Et celui-là, si je te proposais de refaire le quatrième de couverture de ce livre ?
Oui, sauf que celui-ci c’est plein de choses, ce livre a une histoire très spéciale. Ce sont de faux entretiens, il s’est posé des questions ultra véreuses, sur sa tendance à être mytho, à toujours fabuler son passé, il est génial ce mec, je l’adore, mais il se pose des questions là-dessus qui le piègent complètement, mais c’est lui en fait. Il a pris le nom d’un copain, qui est complice, mais c’est lui qui se pose les questions. C’est incroyable.
Il y a ‘‘ Pseudo ’’, c’est d’une puissance terrible. ‘‘ Pseudo ’’ c’est : On n’est jamais qui on croit être, celui que les autres pensent qu’on est. C’est le truc sur l’usurpation magnifique.
Il y a Gary, voilà, mais tout Gary, il y en a cinquante mais je suis fan absolu.
Mais après, les livres très puissants, il y a Malcolm Lowry, ‘‘ Au dessous du volcan ’’. Il y a le clan des gens qui ont lu Malcolm Lowry et qui adorent, et ceux qui ne comprennent pas ça. Il faut le lire, c’est complètement unique. Le mec a écrit un roman, il l’a perdu dans un bistrot, c’était un pochtron de première, il l’a envoyé à un éditeur, le mec ne lui a jamais renvoyé, il n’avait pas fait de double, après sa maison a brûlé, il l’a écrit quatre fois. Et donc, le mec, je peux te garantir que c’est raboté, il n’y a rien en trop.
Mon auteur fétiche, c’est Macedonio Fernandez, alors là, attention le niveau, c’est un argentin, notable, peut-être médecin, un érudit de première ; et sa femme est morte, et il a tout plaqué, il a abandonné ses enfants, il est parti dans la rue avec une guitare et du papier, il écrivait des trucs, il les jetait, et des mecs récupéraient tout ce qu’il écrivait parce que c’était un génie absolu. Mais pas que de la littérature, le mec a un style de fou. Mais c’est de la pensée, c’est un philosophe. C’est carrément à part, pour moi il y a lui et il y a les autres.
Il y a Nietzsche, pour moi c’est autant un artiste qu’un philosophe, c’est un penseur mais ses bouquins, c’est d’un art complet.
Celui-là, tu m’as bien donné envie de le découvrir, je vais faire quelques recherches dessus.
Macedonio Fernandes, tu lis ça, tu n’as plus envie d’écrire, tellement il met la barre dans le ciel.
Je vais faire attention en ce moment parce que moi aussi je suis en train d’écrire.
C’est du très très haut niveau. Sinon il y en a des masses, mais il y a ‘‘Diadorim’’, mais je ne me souviens plus du nom de l’auteur, c’est un brésilien. Il a écrit un roman, il a dû mettre quinze ans à l’écrire. C’est les histoire de mecs dans la pampa, les guérillas, et dans l’âme humaine, dans ce livre il y a tout, sur la fourberie de l’homme, sur la peinture de l’homme, cette bête, c’est quoi cet animal.
Et rien en Science-fiction ?
Je n’y connais rien. Mes potes m’ont dit de lire… » Fondation » d’Isaac Asimov. Et je dois me le faire sous peu.
Et sinon en ce moment, j’ai lu tout Céline, outre les provocations dont le mec est capable, les saloperies qu’il peut raconter, etc., au niveau littéraire, c’est juste assourdissant. Le côté antisémite est présent dans certains livres, et complètement absent d’autres livres. Donc quand tu sais… Quand tu vois les interviews aussi sur Youtube, tu te dis quel drôle de mec. Le mec il dit : « Ce qu’il manque aux gens, c’est le style. – Mais bon Chateaubriand, il y a du style. – Non, il n’a pas de style » et il parle et il dit « il n’y a pas de style, il n’y pas de style. ». Et c’est vrai que quand tu lis ses livres, tu te rends compte de ce que c’est que le style, d’être capable d’être aussi pointu en littérature, et de s’inventer un style, de parler un peu foireux comme ça, et tu regardes ‘‘ Voyage au bout de la nuit ’’ moi ça m’a… C’est incroyable, en plus lui, les paragraphes ils ne servent qu’à une chose, c’est à mettre en valeur une idée de fou, une image incroyable, donc il te fait un paragraphe et tu peux être sûr qu’à la fin d’un paragraphe, c’est une image qui te cartonne, une métaphore, il a le sens de la formule ; c’est d’un niveau, c’est juste miraculeux. Littérairement c’est juste miraculeux.
Boulimique de littérature, je vois que je t’embarque sur la littérature…
J’ai fait de la musique depuis que j’ai cinq ans, mais je crois que mon truc c’est la littérature, je pense que je me suis trompé de métier.
D’où le passage à l’écriture dans lequel tu comptes maintenant te réaliser.
Et maintenant quarante balais, et je me mets à la littérature. Bon, j’ai fait de la poésie, mais comme tout le monde.
Après, il suffit d’un poème.
Mais là, le roman c’est vraiment un truc qui me tient à cœur, la mort c’est un truc qui me travaille, ce n’est pas vraiment que j’ai peur de la mort, mais bon, dans toute ma famille ils sont morts, je suis le dernier des miens ; bon, j’ai une femme des enfants, mais toute ma famille quand j’étais petit, sœur, frère, parents…
Donc c’est l’histoire d’un mec qui part, et il apprend, on ne le sait qu’après, il est parti suite à entretien avec un médecin qui lui a révélé qu’il avait une maladie – on ne sait pas trop ce que c’est d’ailleurs : « Vous allez mourir dans quelques mois », et il décide de partir pour que la femme qui l’aime ne voit pas la chose.
Il part et donc : Pourquoi partir, qui suis-je, pourquoi je viens là, pourquoi j’ai peur ? Et c’est ça le roman en fait.
Mais c’est un truc qui m’inspire, la Mort c’est un truc fort, et puis l’Amour, le mélange d’Amour et de Mort. Et puis la fin, c’est cette histoire de l’eau.
Non, ne me raconte quand même pas la fin avant, laisse-moi le déguster et ce sera avec grand plaisir.
Entretien réalisé par Romain Breton.